Si chaque image porte en elle un souvenir, ce dernier peut-il disparaître lorsque l'on en efface les protagonistes ? Voilà une question que posent les clichés de Nhu Xuan Hua, dont la série au long cours Tropism témoigne d'un grand travail de réappropriation de la mémoire. Française d’origine vietnamienne, la trentenaire est habitée, comme beaucoup de descendants d’immigrés de deuxième génération, par une volonté de reconnecter avec ses racines et de son histoire familiale qu’elle n’a pu connaître que de loin. Après un second voyage au Vietnam, la photographe de mode s’est alors plongée dans les albums photos de ses parents pour en extraire des dizaines d’images d’archives dont elle a minutieusement effacé les corps sur Photoshop. En résultent des scènes dans des décors domestiques ou extérieurs dépourvues de leurs sujets – journées à la plage, repas d’anniversaire –, où seules quelques fines et discrètes lignes esquissent la silhouette des individus jadis présents dans l’image, désormais réduits à des formes spectrales. Par ce procédé, l’artiste semble ainsi faire de ces morceaux du passé des surfaces vierges où pourront s’écrire ses propres récits, mais aussi ouvrir des espaces de projection plus vastes, libres et universels pour les spectateurs de ces œuvres.
Stand de la galerie Anne-Laure Buffard, SC07.